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Midi Libre : "Le vin, c'est une success-story européenne. Confier le groupes d'études au RN, c'est un non-sens"

La députée européenne Renew Irène Tolleret, co-présidente de l'intergroupe Vins au Parlement Européen, et viticultrice à Fontanès dans l'Hérault, réagit à la décision du bureau de l'Assemblée nationale d'attribuer la présidence du groupe d'études vins et viticulture au Rassemblement national. Vous aviez annoncé votre refus de travailler avec le groupe d'études vin de l'Assemblée nationale si sa présidence était confiée au Rassemblement national. Cela a été validé... 

Et c'est une information que je déplore. Le vin, particulièrement le vin français, particulièrement celui de notre région, est une success-story européenne. C’est la politique la plus intégrée au niveau européen. Je prends un exemple : les vins de notre région construisent aujourd'hui leur valeur ajoutée sur les signes de qualité, un Écouter cet article Powered by ETX Studio 00:00/03:45 règlement européen voté le 14 juillet 1992. Les AOC françaises ont nourri les AOC européennes et à partir du moment où on les a mises au niveau européen, ça a permis de les intégrer dans des accords de commerce, de développer une valeur très importante d’exportation de vins européens, d'accompagner ce travail par des budgets de communication qui ont eux-mêmes permis de développer l'œnotourisme en zone rurale. On s'apprête donc à confier un dossier dans lequel les solutions européennes sont totalement adaptées à la filière, à un parti profondément anti-européen. C'est un non-sens.

Le rôle de ce groupe d'études à l'Assemblée nationale est-il si important, notamment dans ses liens avec l'Europe ? 

Bien sûr. Je prends un exemple. Pendant la crise du Covid, entre autres à cause de la fermeture des restaurants, la profession viticole s'est retrouvée en difficulté. Nous avons Vous souhaitez suivre ce fil de discussion ? été alertés, notamment par Jérôme Despey (le président de la chambre d'agriculture de l'Hérault, NDLR), de l'urgence à distiller, donc d'établir les appels à volume rapidement. Il y a eu une coordination efficace entre le groupe vins de l'Assemblée nationale et celui de l'Union Européenne pour que les textes européens soient publiés début mai, ce qui a permis de lancer l'appel à volumes dès le mois de juin. Les vignerons n'ont par ailleurs jamais été payés aussi vite parce qu'il y a eu ces discussions entre Paris et Bruxelles.

Mais le RN, sur ces questions, ne peut-il faire preuve de pragmatisme ? Ça voudrait dire qu’ils sont devenus favorables au libre-échange ? Les élus RN, ce ne sont que des Miss météo des mauvaises nouvelles, mais après ? 

Moi, je suis dans le camp des élus qui préfèrent l’action pour résoudre des problèmes, et une action pro-européenne, quitte à changer l’UE de l’intérieur. Je vous rappelle qu'on vient de voter un texte sur l’interdiction de la déforestation importée. Je vois l'action des élus RN au niveau européen, ils sont ultraminoritaires, n'arrivent pas à sortir un seul texte. Pour moi, c'est donc clair, en ma qualité de co-présidente de l'inter-groupe vins du Parlement européen, je ne travaillerai pas avec des anti-européens, surtout sur une filière qui doit ses succès à l'échelon européen. Plus globalement, le Rassemblement national, pour moi, c’est un adversaire, un ennemi politique, et je ne veux pas le crédibiliser.

Mais quel avenir pour ce groupe d'études à l'Assemblée nationale jugé comme l'un des plus importants ? 

Je suis inquiète. Je prends l'exemple du problème actuel qui touche aujourd'hui le vignoble bordelais. Face à un problème d'excédent structurel, les vignerons réclament un plan d'arrachage subventionné de plusieurs milliers d'hectares de vignes. Mais avec les fonds européens, ce n'est pas possible, puisqu'on finance la plantation et non l'arrachage. Alors on fait quoi ? On sort du cadre européen, de la Pac ? Quelles solutions concrètes vont proposer les élus du RN ? Comme le disent les Italiens : ils ont voulu faire du vélo, eh bien qu'ils pédalent maintenant. Qu’ils montrent ce qu’ils savent faire en matière de viticulture. De mon côté, je continuerai mon travail avec l’ensemble des parlementaires pro-européens qui travaillent sur la filière. Le vin est très important dans notre balance du commerce extérieur, dans notre culture, dans notre rapport au plaisir... Tout ça est finalement antinomique avec le RN.

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